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L’ascension fulgurante de la technologie blockchain ne l’empêche pas d’être sévèrement critiquée sur plusieurs points.
L’un d’eux est son empreinte carbone : beaucoup considèrent les cryptomonnaies comme polluantes et une alternative non durable au système traditionnel.
Cela peut être un véritable frein à l’adoption.
Mais la réalité reste plus nuancée. Comme le démontre le récent « Merge » d’Ethereum, il existe désormais un effort mondial pour réduire l’impact environnemental des cryptomonnaies.
Certains projets luttent activement pour rendre plus écologique l’écosystème blockchain. C’est le cas de Mintera, une entreprise française qui propose des produits d’investissement blockchain durables et qui a fait l’objet d’un précédent article.
De nombreuses applications de la technologie blockchain restent inexploitées et de nouveaux cas d’utilisation potentiels émergent constamment. L’un des sujets récemment abordés est le rôle que la blockchain peut jouer dans le développement durable et l’économie régénérative.
Alors que les objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies sont définis pour guider les efforts mondiaux en matière de développement durable au cours de la prochaine décennie, il est important d’examiner comment la technologie blockchain peut aider à leur réalisation. Nous savons que la blockchain peut permettre de documenter des impacts environnementaux, promouvoir la transparence et la responsabilité, et conduire à des changements de comportement durables.
Alors, peut-on concilier blockchain et développement durable ? La technologie a le potentiel d’aider à relever les défis environnementaux, mais fait face à des défis qui doivent être relevés pour en faire une réalité.
Pourquoi certaines cryptomonnaies polluent
Le principal facteur qui conduit à la consommation énergétique des cryptomonnaies est leur protocole de consensus qui permet de faire fonctionner le réseau.
Certaines cryptomonnaies nécessitent des « mineurs » pour fonctionner. C’est-à-dire des machines qui valident les transactions à l’aide de calculs intensifs et énergivores.
Le Bitcoin est l’exemple le plus célèbre. Depuis sa création en 2009, il fonctionne grâce à l’algorithme “Proof-of-Work”. Cette preuve de travail consiste en la réalisation de calculs intensifs par des appareils électroniques appelés ASICs, qui permettent aux mineurs de valider des transactions et de gagner des récompenses en Bitcoin.
Les machines effectuant ce travail sont extrêmement énergivores. Cette énergie peut provenir de diverses sources, mais est en réalité souvent dérivée de combustibles fossiles. Le minage libère également de nouveaux Bitcoins qui permettent de rémunérer les mineurs automatiquement.
La croissance historique du prix du Bitcoin a rendu le minage de plus en plus rentable. Logiquement, cela pousse à la hausse le nombre de mineurs actifs.
Le minage peut être une source importante de revenus, de sorte que nombreux sont ceux qui utilisent des machines gourmandes en énergie pour essayer d’obtenir une part des bénéfices. Et plus il y a de mineurs, plus il est difficile de valider des blocs, et plus cela consomme d’énergie à travers le monde.
L’impact environnemental du minage de cryptomonnaie
Les cryptomonnaies ont gagné en popularité ces dernières années, et leur empreinte carbone a globalement suivi la tendance.
D’après une récente étude du New York Times, le Bitcoin utilise à lui seul environ 0,5% de toute l’énergie consommée à travers le monde.
Il s’agit cependant d’une estimation : déterminer avec précision l’empreinte carbone réelle du réseau Bitcoin est un défi car de nombreuses variables entrent en jeu.
Une même quantité d’énergie peut être plus ou moins polluante suivant sa provenance (centrales à charbon, énergies renouvelables, nucléaire…). Ainsi, il s’agit d’estimer non seulement la consommation d’énergie totale du réseau (qui dépend de nombreux facteurs), mais aussi d’où provient cette énergie.
Cela dit, l’impact environnemental du minage de Bitcoin a été largement étudié. L’industrie a globalement une empreinte carbone élevée et participe au dérèglement climatique en raison de deux facteurs principaux :
- La forte consommation énergétique du réseau
- Le matériel utilisé qui peut rapidement devenir obsolète, créant de grandes quantités de déchets électroniques.
D’après le Bitcoin Energy Consumption Index, le processus d’extraction de BTC consomme autant d’énergie qu’un pays développé comme la Norvège. Actuellement, la consommation d’énergie des mineurs de Bitcoin se situe autour de 130 TWh par an.
Cette valeur fluctue en fonction de la rentabilité du minage. Elle a culminé à 204 TWh et suit une tendance générale à la hausse depuis 2009. On estime que l’empreinte carbone de chaque transaction Bitcoin équivaut aujourd’hui à plusieurs centaines de milliers de transactions Visa.
De plus, les mineurs doivent opérer l’équipement le plus à jour pour rester compétitifs. La concurrence pour gagner les récompenses du minage les pousse à se fournir en énergie auprès des sources les moins chères. Cela signifie souvent des centrales à charbon.
Notez que ces chiffres ne représentent que le Bitcoin. De nombreuses autres cryptomonnaies utilisent des algorithmes de preuve de travail, de sorte que la consommation réelle d’énergie de l’écosystème est beaucoup plus élevée.
Est-ce que ce système est durable ? Nous vous laissons en juger.
Cependant, certains pensent que le minage de cryptomonnaie peut aider à réduire notre dépendance aux énergies fossiles.
Il est vrai que de nombreux mineurs se déplacent vers des pays disposant d’un excédent d’énergie renouvelable, comme la Russie et l’Islande. Certains défenseurs du Proof-of-Work vont jusqu’à dire que le minage de Bitcoin a le potentiel de promouvoir et de stimuler l’utilisation des énergies renouvelables dans le monde.
Il est aussi possible de réduire l’impact environnemental du minage en utilisant des sources d’énergie renouvelables telles que le gaz naturel, l’énergie solaire ou l’énergie hydroélectrique. Le matériel de minage peut également être optimisé pour atteindre une meilleure efficacité énergétique.
Néanmoins, même si toutes les opérations d’extraction de cryptomonnaie étaient entièrement alimentées par des énergies renouvelables, elles consommeraient toujours d’énormes quantités d’électricité et contribueraient à l’empreinte carbone mondiale.
En fait, fournir de l’énergie (renouvelable ou non) dans le seul but de miner du Bitcoin signifie qu’elle ne sera pas utilisée pour faire fonctionner une maison, une usine ou un véhicule électrique.
Il est clair que dans son état actuel le minage de cryptomonnaie impacte globalement négativement l’environnement.
Les cryptomonnaies peuvent-elles être vertes ?
La bonne nouvelle est que oui, les cryptomonnaies peuvent être vertes.
En fait, certaines blockchains sont conçues pour être très économes en énergie.
Pour ce faire, elles utilisent des algorithmes de consensus sans preuve de travail pour réduire considérablement, voire éliminer complètement l’empreinte carbone du processus de minage.
Par exemple, Ethereum a subi une mise à jour majeure récemment, pour passer d’un algorithme de preuve de travail à un algorithme de preuve de participation (Proof-of-Stake). Cela permet d’éliminer le matériel de minage gourmand en énergie en le remplaçant par des « validateurs » pour réduire la majeure partie de la consommation d’énergie.
Cette mise à niveau a rendu Ethereum 99,95% plus économe en énergie. Grâce au Proof of Stake, Ethereum ne consomme plus qu’environ 2,62 mégawatts dans le monde, un niveau équivalent à une petite ville américaine d’environ 2100 foyers.
Il existe d’autres alternatives, développées depuis plusieurs années. XRPL a été la première blockchain connue à atteindre la neutralité carbone, une étape franchie en octobre 2020.
Un autre exemple est Chia, une cryptomonnaie lancée en 2021 et conçue pour être 500 fois plus économe en énergie que le Bitcoin en remplaçant les mineurs ASIC par des disques durs souvent inactifs.
Les innovations sont nombreuses dans l’écosystème et il existe d’autres algorithmes tels que les variantes de Proof-of-Stake, les DAG, le XRP Ledger, la preuve de capacité… Dans l’ensemble, la tendance est aux protocoles de consensus plus écologiques. En conséquence, le nombre de défenseurs de la preuve de travail a tendance à diminuer.
Nous assistons également à l’essor des “cryptomonnaies vertes”, des jetons spécialement conçus pour résoudre les problèmes environnementaux.
Par exemple, certaines cryptomonnaies vertes peuvent être utilisées dans le cadre de crédits carbone et aider à compenser des émissions de gaz à effet de serre. D’autres sont conçues pour servir à financer des projets d’énergie verte tels que des parcs solaires et éoliens.
Les cryptomonnaies vertes sont intéressantes dans la mesure où elles offrent aux particuliers un moyen d’investir dans le développement durable sans recourir aux institutions financières traditionnelles.
Voici quelques exemples de la manière dont la blockchain peut contribuer à créer un avenir plus durable :
- Gamification : les protocoles peuvent récompenser les participants qui prennent des mesures réelles pour supprimer les émissions de CO2 avec des jetons ou des NFT ayant une valeur monétaire.
- Responsabilité : les blockchains peuvent suivre les émissions de carbone et des données climatiques pour tenir les gouvernements, les entreprises et les ONG responsables des objectifs climatiques.
- Tokenisation : la tokenisation des actifs de séquestration du carbone, tels que les forêts tropicales ou les crédits carbone, permet d’encourager des comportements plus respectueux du climat, tout en protégeant les actifs naturels.
- Tirer parti des communautés : Les DAO et autres communautés organisées sur le Web3 fournissent une structure qui peut faciliter la collecte de fonds pour des causes climatiques et la diffusion d’actions écologiques.
Comment rendre la blockchain plus écologique ?
Il n’y a pas de réponse unique à cette question, car la durabilité d’une solution de blockchain particulière dépend de nombreux facteurs. On peut examiner la solution technologique, les cas d’utilisation ainsi que le modèle de gouvernance.
Cependant, certains principes généraux peuvent aider l’écosystème à rendre les solutions de blockchain plus écologiques.
- Utilisez des cryptomonnaies à faible consommation d’énergie et privilégiez les sources d’énergie renouvelables. Cela réduit non seulement l’empreinte carbone, mais garantit également que la solution continuera à fonctionner même si le réseau énergétique traditionnel dysfonctionne.
- Utilisez la blockchain pour prendre en charge des applications durables. Par exemple, des tokens peuvent être utilisés pour récompenser les personnes qui participent à des projets environnementaux. De plus, la blockchain peut être utilisée pour suivre des émissions de carbone. Cela encourage la participation à des activités bénéfiques pour l’environnement. Même des cryptomonnaies qui ne sont pas durables en soit peuvent être utilisées de manière à soutenir des efforts environnementaux.
- Compensez l’empreinte carbone de votre activité. Grâce à cela, les entreprises blockchain peuvent même avoir un impact positif net sur l’environnement. Par exemple, Mintera s’est engagé à reverser 50% de ses profits à des associations environnementales.
- Promouvoir une utilisation durable et responsable. Par exemple, en éduquant les utilisateurs sur la meilleure façon de tirer parti de la technologie pour minimiser la consommation de ressources et maximiser l’efficacité du système.
Conclusion
À mesure que la technologie blockchain se développe et se généralise, il est important de prendre en compte son impact sur la durabilité. La consommation d’énergie des réseaux comme Bitcoin peut en rebuter plus d’un, et c’est bien normal.
Cependant, la technologie blockchain est là pour durer. La plupart des acteurs sont conscients de certains problèmes écologiques de la blockchain et tentent activement de les résoudre.
Ces efforts plus larges pour réduire l’énorme consommation d’énergie de certains réseaux de cryptomonnaie sont rendus possibles grâce à l’utilisation de sources d’énergie renouvelables ou d’innovations technologiques visant à réduire la consommation d’énergie des protocoles de consensus.
Aujourd’hui, il existe déjà de nombreuses solutions pour ceux qui veulent participer à cet écosystème tout en gardant leur empreinte carbone très limitée ou en maintenant un impact net positif sur l’environnement.
Cette tendance devrait se poursuivre.